Le député de la première circonscription de Corse-du-Sud Jean-Jacques Ferrara (LR) s'oppose à la proposition de loi contre la spéculation foncière et immobilière portée par les députés nationalistes. Photo : Michel Luccioni
Les trois députés nationalistes ont déposé une proposition de loi pour lutter contre la spéculation foncière et immobilière. Pourquoi êtes-vous contre ce texte ?
Le principe en lui-même de penser à une réglementation, à une loi qui vise à endiguer la spéculation immobilière et foncière, je ne suis pas contre. Surtout que je ne suis pas partie prenante, je n’ai pas d’intérêt dans cette affaire, je ne suis pas un lobbyiste, je ne suis pas l’homme d’un clan, d’un parti, je ne loue rien, j’ai un appartement à Ajaccio et une maison familiale à Olmeto village dont mes parents sont usufruitiers. Donc sur le principe, aucun problème.
Vous dites dans votre question au gouvernement ne pas vouloir que l’île soit traitée différemment d’Arcachon ou de la Côte d’Azur, mais n’y a t-il pas des enjeux spécifiques à la Corse ?
Je suis élu de la nation, je me préoccupe des sujets nationaux. C’est un sujet qui n’appartient pas qu’à la Corse. J’ai cité Arcachon et la Côte d’Azur mais j’aurais pu citer l’Île de Ré ou Saint Tropez, où le problème existe également…
Vous dénoncez un texte « déconnecté de la réalité » et indiquez que les Corses eux-mêmes risquent d'être pénalisés. Pourquoi ?
J’ai peur que cette proposition de loi ne pénalise les Corses qui ont, et c’est le cas d’environ la moitié de la population, des résidences secondaires qui sont des maisons de villages, des biens de famille, qui ne sont pas situés uniquement en montagne et qui peuvent avoir une certaine valeur. Je crains qu’ils ne soient lourdement impactés par les dispositions de ce texte, ce qui va à l’encontre de la volonté initiale des députés, que je crois sincères dans leur démarche. Certains Corses peuvent se retrouver dans l’incapacité de payer cette taxe supplémentaire.
Par ailleurs, la préemption, cela suscite chez moi la plus grande prudence. Je suis très attaché au principe de la propriété privée, qui est intangible. Et oui, j’appartiens à une famille politique également attachée à ce principe, comme la majorité des gens d’ailleurs. La préemption, c’est très violent.
Par ailleurs, la préemption, cela suscite chez moi la plus grande prudence. Je suis très attaché au principe de la propriété privée, qui est intangible. Et oui, j’appartiens à une famille politique également attachée à ce principe, comme la majorité des gens d’ailleurs. La préemption, c’est très violent.
Vous émettez des doutes quant à la viabilité du texte. Pourquoi ?
Juridiquement, je pense que la proposition de loi n’est pas viable et quand bien même elle viendrait à être adoptée à l'Assemblée, je pense qu'au Sénat, cela va être compliqué. Par ailleurs, je rappelle que certaines lois votées n’ont jamais été promulguées, comme celle de Sauveur Gandolfi-Scheit sur le rapprochement des prisonniers.
Quand on veut être efficace pour améliorer le quotidien des gens, on fait en sorte de le faire pour qu’il y ait une traduction rapide dans les faits. Là, c’est une victoire à la Pyrrhus avant les territoriales, mais cela ne changera rien dans le quotidien des Corses.
Quand on veut être efficace pour améliorer le quotidien des gens, on fait en sorte de le faire pour qu’il y ait une traduction rapide dans les faits. Là, c’est une victoire à la Pyrrhus avant les territoriales, mais cela ne changera rien dans le quotidien des Corses.
De votre côté, que proposez-vous pour lutter contre la spéculation foncière et immobilière ?
C’est un problème national, aigu chez nous certes, plus aigu même peut être, car nous connaissons la pauvreté, nous sommes peu nombreux, c’est une île… Mais, comme je le disais, il est partagé par d’autres territoires.
Un programme ambitieux serait de dire qu’il faut redynamiser l’économie pour générer des profits et permettre aux Corses d’acheter en Corse. C’est cela, le vrai problème. La pauvreté, moi je ne m’y résous pas. Que voulons-nous faire de l’économie en Corse ? Voulons-nous que les gens vivent mieux et s’enrichissent pour acheter des maisons et se réaccaparer le foncier ?
Et pour cela, il faut que le cadre soit clair. Aujourd’hui, les maires sont confrontés à un mur. Ils voudraient construire des logements sociaux et sont bloqués par des lois qui se superposent, comme la loi littoral ou la loi montagne, et qui aboutissent à une raréfaction des biens. Il faut revenir aux origines du mal : pourquoi la situation est telle ? Parce que les terrains sont rares. Il faut avoir une vision globale de ces problèmes.
Un programme ambitieux serait de dire qu’il faut redynamiser l’économie pour générer des profits et permettre aux Corses d’acheter en Corse. C’est cela, le vrai problème. La pauvreté, moi je ne m’y résous pas. Que voulons-nous faire de l’économie en Corse ? Voulons-nous que les gens vivent mieux et s’enrichissent pour acheter des maisons et se réaccaparer le foncier ?
Et pour cela, il faut que le cadre soit clair. Aujourd’hui, les maires sont confrontés à un mur. Ils voudraient construire des logements sociaux et sont bloqués par des lois qui se superposent, comme la loi littoral ou la loi montagne, et qui aboutissent à une raréfaction des biens. Il faut revenir aux origines du mal : pourquoi la situation est telle ? Parce que les terrains sont rares. Il faut avoir une vision globale de ces problèmes.
Une refonte de la fiscalité ne pourrait-elle pas être un élément de la solution ?
Si on veut refonder la fiscalité, on peut le faire, mais il faut que les fonds reviennent à ceux qui aménagent le territoire, à savoir les communes. Avec ce texte, le bloc communal serait dépossédé d’une partie de ses ressources, puisque la taxation des résidences secondaires reviendrait à la Collectivité de Corse. Et ce, alors que certaines communes comme Ajaccio ont mis en place une surtaxation pour les résidences secondaires. L’intercommunalité est en train de monter en puissance, l’État lui confie des compétences supplémentaires, pas toujours financées… Si on avait proposé de reverser le produit de la taxe aux communes, au lieu de la Collectivité de Corse, j’aurais peut être été d’accord. Le jacobinisme existe en Corse, il n’est pas qu’à Paris.